À première vue, le moteur à combustion ne suscite plus guère d’enthousiasme. Mais il faut savoir passer outre la première impression. C’est très facile avec Christian Nellen, professeur de la HEIA-FR et connaisseur passionné. 

Il faut dire que les moteurs sont au cœur de sa carrière. Dans ses études de technique automobile à Bienne, il s’est très vite spécialisé dans le moteur à combustion. Il a ensuite travaillé à l’ETHZ, comme responsable d’un projet de moteur à gaz – cogénération – en collaboration avec l’entreprise Liebherr. Ce fut un grand succès.

«Il m’a toujours fallu plus de challenges dans ma carrière», raconte-t-il pour expliquer son départ pour l’Angleterre, chez Cosworth, qui produisait les moteurs de la Ford Focus du Championnat du monde de rallye. Mais il rêvait surtout de F1. Il est donc entré chez Renault F1, où il a travaillé 11 ans. «J’étais responsable de la conception de pièces de moteur dans le bureau d’études, principalement de la culasse et du e-turbo, qui jouent un rôle très important pour la performance. Pour moi, c’était le challenge ultime. Car le moteur de F1 est le plus difficile à maîtriser: on va aux limites de la physique. Pour utiliser une image: le meilleur piston de F1, c’est celui qui fissure sur la ligne d’arrivée: juste assez solide et le plus léger possible. J’ai toujours aimé la complexité du moteur: il y a de la mécanique, de la thermodynamique, de la thermomécanique, de la combustion et bien sûr de l’électronique.»

L’avenir, c’est l’hydrogène

Encore un avenir pour le moteur à explosion dans un monde qui lutte contre les émissions de CO2? «Oui, si on l’alimente à l’hydrogène». C’est le cœur de ses travaux au sein du groupe motorisation – une petite équipe de passionnés qui monte en puissance – de l’institut SESI à la HEIA-FR.

«Nous avons aujourd’hui besoin d’un saut quantique. Dans l’optimisation du moteur à combustible fossile, aujourd’hui, on doit investir beaucoup pour gagner de misérables dixièmes de pourcent de rendement. Nous travaillons donc à la conversion des moteurs à combustion existants pour un fonctionnement à l'hydrogène, tout en optimisant le rendement et les émissions de NOx, pour pouvoir l'appliquer à n'importe quel moteur, en tirant avantage des progrès réalisés récemment en matière de stockage de l'hydrogène et de sécurité.»

L’enjeu est de transformer, avec des investissements faibles, une partie du gigantesque parc de véhicules suisses dans un temps très court et vers des solutions durables. Le groupe motorisation s’intéresse de nombreuses applications, allant de la mobilité aux moteurs industriels. Dans tous ces domaines, le moteur à hydrogène est une alternative très intéressante. L’équipe est en train de monter un très gros projet pour des bus fonctionnant à l’hydrogène.

Christian Nellen est convaincu que l’hydrogène dans les moteurs est une solution beaucoup plus intéressante que le 100% électrique ou que la pile à combustible, entre autres parce qu’elle n’exige pas le passage par la conception, de A à Z, de nouveaux véhicules. Les problèmes du recyclage des batteries, de leur volume, de leur poids et de leur durée de vie sont aussi des limites, à ses yeux.

«Le moteur à hydrogène est une solution qui permet d’atteindre le zéro CO2, si l’on produit l’hydrogène de façon renouvelable, et qui, en plus, est rapidement implantable sur une technologie éprouvée, recyclable et qui fonctionne depuis très longtemps.»

Le groupe motorisation est à la disposition des industriels intéressés. «Aujourd’hui, nous nous sommes beaucoup développés dans le domaine de la simulation numérique et nous sommes en train de monter des bancs d’essais que nous allons utiliser pour nos partenaires et d’autres industriels dans le cadre de développement de moteurs.» 

Répertoire des compétences HES-SO

9 juillet 2019