A la fin des années 1990, Thomas Jusselme termine une formation d’ingénieur en environnement à Lyon. Déterminé et clairvoyant, le chercheur est convaincu qu’à la place de travailler à ce que l’industrie existante soit moins polluante, il serait plus judicieux de régler le problème à la source. «Je voulais travailler sur la conception même des produits. L’idée était de repenser les processus de conception afin de générer moins de pollution, plutôt que de traiter cette dernière a posteriori», précise-t-il. Il entame alors un Master en design industriel à l’Université technologique de Compiègne, ce qui, en ce début des années 2000, était un parcours inhabituel. «Je voulais faire le pont entre l’ingénierie environnementale et le processus de conception pour intégrer la dimension environnementale directement dans la conception des produits. C’est ce qu’on appelle l’éco-conception.»

Après différents stages qui l’ont notamment amené à étudier les impacts environnementaux d’un haut-parleur chez le géant japonais Sony, Thomas Jusselme enrichit son parcours d’une nouvelle expérience. Accompagné de deux collègues, il parcourt plus de 25 pays, entre l’Europe de l’Est et l’Asie, afin d’étudier comment ces derniers, limités en termes de ressources énergétiques, construisent de manière durable et raisonnée. Cette expérience lui permet de confirmer son projet professionnel: valoriser ses compétences dans le secteur de la construction durable.

Dans cette idée, en 2006, il cofonde deux structures: une agence d’architecture et un bureau d’ingénierie, dont l’objectif est d’accompagner la conception de bâtiments efficaces en énergie. Parallèlement, il enseigne au sein de différentes écoles d’architecture et d’ingénierie, entre Lyon et Grenoble. Dans le cadre de son activité d’enseignant, il participe au Solar Decathlon, une compétition internationale au sein de laquelle différentes équipes, constituées de dizaines d’étudiants, conçoivent des prototypes d’habitats solaires[1]. Fort de cette activité, le chercheur est contacté par l’EPFL pour diriger le programme de recherche qui mènera à la construction du futur bâtiment du Smart Living Lab, sur le site de blueFACTORY à Fribourg.

C’est donc en 2014 que Thomas Jusselme rejoint Fribourg. Dès lors, il entreprend successivement de nombreux travaux: rédaction de sa thèse, création d’une start-up, recherche pour l’EPFL et enseignement au sein de la HEIA-FR… En 2019, sa thèse et ses engagements avec l’EPFL en cours de finalisation, il candidate au poste de professeur en efficience énergétique du bâtiment pour lequel il est retenu.

Au sein de l’école, Thomas Jusselme enseigne aux élèves de troisième année de génie mécanique ayant choisi l’option énergie. Il dispense également certains cours en génie civil et suit des travaux de Bachelor. «Les futurs ingénieurs doivent apprendre à considérer le bâtiment comme un ensemble, un système. Il n’y a pas que la consommation énergétique qui doit être prise en compte, mais aussi son impact carbone, la question du confort, etc.», précise-t-il. Le chercheur est également responsable de projets de recherche, toujours axés sur la performance énergie/carbone des bâtiments.

Convaincu de la richesse des parcours atypiques, Thomas Jusselme souhaite encourager les jeunes ingénieurs à penser en termes d’interdisciplinarité. «C’est important de se construire un parcours unique. En gardant un fil conducteur, on peut évoluer d’un domaine à l’autre. La recherche a besoin de personnes qui ont une vision interdisciplinaire et qui sont capables de voir le problème à une échelle macro. Les questions environnementales ont besoin d’interdisciplinarité.» Il conseille encore: «Il faut toujours avoir un pied à différentes échelles. J’ai toujours lié des activités très ancrées dans l’économie, dans la réalité à mes activités d’enseignement et de recherche. Les deux se nourrissent car on mène des projets de recherche pour avoir un impact dans le réel, et en même temps, la réalité économique nourrit la recherche de contraintes opérationnelles. Ce n’est pas toujours facile à concilier, cela demande beaucoup de travail, mais c’est primordial.»

[1] En 2017, le NeighborHub construit à Fribourg par des étudiants des institutions membres du Smart Living Lab sur blueFACTORY a triomphé lors de cette prestigieuse compétition internationale du Solar Decathlon à Denver.

Répertoire des compétences HES-SO

6 avril 2021